« Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrais jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire ».
S.G. Tallentyre, de son vrai nom Eveyln Beatrice Hall, « The Friends of Voltaire », 1906 – Citation apocryphe attribuée à Voltaire, ndlr.
Salut à toi, jeune Padawan,
J’espère que tes vacances ont été reposantes, car ici nous redémarrons sur les chapeaux de roues.
Avant de te parler dans ce billet du sujet du jour qui me tient particulièrement à coeur en ces temps inédits, il va me falloir faire un petit aparté à propos d’un monde dans lequel nous vivons tous, celui qui nous aide autant qu’il nous dessert. En voiture Simone.
Bienvenue dans le monde de la dissonance cognitive.
La dissonance cognitive, on en fait tous au quotidien. Se promettre d’avoir un mode de vie sain mais faire la fête le samedi soir suivant en se disant que ce n’est qu’une fois par semaine, manger de la viande en disant aimer les animaux, se dire qu’on va reprendre le sport et avoir un sentiment de culpabilité si on n’y va pas, mais à l’inverse ressentir un grand sentiment de fierté quand on y retourne, ne pas ramasser le caca de Médor car on a oublié nos sacs à crottes mais ne pas y retourner après pour aller ramasser car après tout, c’était qu’une fois, ce n’est pas grave. La dissonance cognitive, c’est tous ces petits arrangements que nous nous faisons avec nous même, pour ne jamais dépasser de notre moule de valeurs. Cette petite pirouette de notre cerveau pour nous rassurer dans nos croyances, dans nos gestes, dans notre attitude, est partout, dans tous les événements du quotidien. Mais elle est aussi présente à grande échelle.
Or, autant un petit un confort de se dire ce n’est qu’une fois ou une petite honte de ne pas être allé à la gym du mardi, il est facile de s’en remettre, mais de réaliser qu’on ne vit pas dans le monde dans lequel on croit qu’on vit, c’est autre chose. La dissonance cognitive se fait alors opaque, légion, une armure de mauvaise foi construite tout autour de soi, et quiconque essaie de nous en sortir doit automatiquement être rejeté, exclu, banni.
J’ai moi-même fait l’expérience auprès d’un de mes proches lorsque, relatant une statistique, il m’a demandé agressivement si j’étais médecin. Comme s’il fallait un diplôme en tout pour pouvoir énoncer jusqu’à une simple donnée statistique de niveau CE2. Un peu comme celui qui croit que la terre est plate ne voudra pas t’écouter si tu n’es pas docteur en astronomie. Voilà jusqu’où peut aller la dissonance cognitive. Comme si écouter un avis divergent nous faisait prendre le risque d’être convaincu, et changer d’avis nous faisait alors perdre notre dignité. Pourtant, il n’en est rien, au contraire : autant la fermeture d’esprit est un signe de bêtise, autant ouvrir les yeux sur une fausse croyance est un signe d’intelligence.
L’opinion des autres, un danger ?
Le danger n’est pas dans celui qui s’exprime librement d’après ses propres recherches et analyses au risque de dire des grosses bêtises, car à chacun sa responsabilité de les vérifier et de les croire ou non. Le danger résulte dans celui qui pense que seuls les experts ont le droit de s’exprimer. Car c’est là que réside la pensée unique, l’enfermement de l’opinion par ceux qui ont le droit de penser, voire pire : la dictature.
Certains disent : « Oui mais les experts sont, comme leur nom l’indique, des experts ». Des experts ou des personnes qui, sous couvert du diplôme X ou Y, ont le pouvoir d’influencer les masses ? J’espère pour toi qu’ils sont honnêtes, ces experts sur lesquels tu te reposes ; mais si ce n’était pas le cas ? Si nous vivions dans un monde où certains tirent la couverture à eux et ce peu importe les conséquences, penserais-tu la même chose ? Un indice : nous avons tous la réponse.
Faisons confiance à nos cerveaux
Nous avons tous un cerveau, nous sommes tous en capacité de fournir une réflexion devant des arguments. À plus ou moins grande intensité, certes, mais nous en sommes capables. Penser qu’il faut interdire de s’exprimer à une certaine catégorie de personnes est dangereux, car de quel droit ? Qui ? Et pourquoi ?
Je vais même aller plus loin : tout le monde devrait avoir le droit de tout dire, même des horreurs, car il n’y a que comme cela, en se confrontant au meilleur et au pire, qu’on peut se forger une vraie opinion, un vrai libre arbitre, une vraie conscience et enfin un vrai argumentaire.
De tout temps il y a eu des illuminés, et une poignée de zozos pour y croire. Est-ce que cela a renversé pour autant nos nations ? Jamais. Alors laisse tranquille le type qui croit en la terre plate, en la suprématie de la courgette ronde ou en « Skippy le grand gourou », si ça le rend heureux ; dans le meilleur des cas ils ne font rien de mal après tout, dans le pire il y a des lois, nous sommes protégés.
Le risque que nous prenons actuellement, en essayant de forcer l’ensemble des citoyens à penser de la même manière, c’est de créer plein de petits groupes de pensées parallèles, qui vont s’unir dans le mépris, la laideur, et même dans la haine. Dois-je te donner un indice de ce à quoi je fais référence ? Je pense que ce n’est pas nécessaire.
Ce n’est pas au peuple de s’ériger en tribunal populaire, car là, oui, en effet, il faut être un expert formé à ne pas impliquer ses sentiments personnels dans les affaires sinon c’est la débandade. Juge ou policier, seuls ces types de métiers sont à même d’arrêter, de juger et de punir. Rappelle-toi que quelqu’un qui n’est pas d’accord avec toi n’est pas contre toi, il est juste pour lui-même. Rien ne sert donc d’en être vexé, de s’en offusquer, ou de vouloir faire la police car tu n’en as pas le pouvoir et heureusement. La vie, ce n’est pas tout blanc ou tout noir, mais plutôt de multiples tonalités de gris. Fifty shades of Grey, quoi, lol. Alors prends un thé, un fouet (pardon) et demande-toi plutôt pourquoi cela t’est tant insupportable que quelqu’un ne pense pas comme toi ?
La contradiction a toujours du bon
Avoir une personne en face pour nous apporter une contradiction a toujours du bon, pour nous convaincre, nous conforter, ou pour nous mettre parfois en faux, car c’est comme ça qu’on évolue. Si tu écoutes, regarde et lis que des trucs qui vont toujours dans ton sens, c’est un coup à s’endormir sur ses vieux préceptes sans jamais évoluer intellectuellement, et devenir un vieux con.
Après, si tu constates qu’une très grande partie de la masse n’est pas d’accord avec ce que tu penses, peut-être est-il temps de lancer un débat, ou de t’ouvrir à ce qu’ils ont à dire. Car après tout, si une ribambelle de chevelus ont de vrais arguments, il est peut-être temps de les écouter, même si tu n’aimes pas leur coiffure. Non ?
S’engueuler dans les médias, c’est signe de bonne santé d’un pays, de liberté. L’absence de débats à contrario est très mauvais signe. La censure empêche toute discussion car il ne faudrait pas que les endoctrinés changent de bord. C’est ce à quoi nous assistons aujourd’hui.
La paix s’obtient dans la contradiction
La dictature, c’est la pensée unique. Si tu en doutes encore, ouvre des bouquins d’histoire et observe ce qu’il s’est passé avant les drames. C’est toujours très mauvais signe lorsque tous les médias donnent la même ligne de pensée, sans aucun débat. Très mauvais signe. C’est ce que nous sommes en train de vivre aujourd’hui et nous sommes aux prémices d’un autre drame si nous ne nous réveillons pas.
Aujourd’hui, toute personne pensant autrement que son voisin est appelée « négationniste », « complotiste », c’est exactement ce qu’il s’est passé avant la seconde guerre mondiale. Tout le monde prenait tout à coeur, les uns endoctrinées par la pensée unique, les autres passant pour des fous, dans l’impossibilité d’ouvrir un débat avec les premiers jugeant systématiquement le comportement des seconds par des adjectifs insultants, fermant toute conversation.
Alors c’est quoi qu’on fait ?
Faisons nos propres recherches. En commençant par vérifier l’information qui nous semble être la plus logique. Multiplions les sources d’information, en gardant toujours en tête que chaque piste est à vérifier. Ce n’est pas parce qu’une information va dans notre sens qu’elle est juste, se méfier et les vérifier doublement.
On écoute ceux qui ne pensent pas comme nous, pour nous éduquer, nous sortir de notre confort, même si ça fait mal aux oreilles et que ça fait saigner les yeux, cela nous conforte parfois dans nos valeurs, peut nous ouvrir sur une autre réflexion, ou nous aider à comprendre ce qui a fait que telle ou telle personne en est arrivée à cette réflexion.
Refusons d’interdire. Montons au créneau dès qu’une personne est interdite de s’exprimer. Même si ça fait mal aux croyances, à l’orgueil, à l’égo. Car si nous laissons faire, des petits groupes de pensée parallèle vont se créer, comme c’est arrivé de nombreuses fois dans l’histoire, … et dégénérer. Seule la liberté d’expression est gage de paix.
À nous de nous armer contre la connerie, à nous de ne pas prendre la mouche pour tout et rien, à nous de travailler sur notre égo pour ne pas nous vexer à chaque mot que nous lisons sur internet, à nous d’être des adultes responsables et ne pas prendre tout personnellement comme des enfants qui font un caprice. Forgeons-nous un mental de chevalier vaillant. Faisons glisser les remarques du con de base sur notre armure d’éducation et d’équilibre émotionnel. Ne pas se vexer, enfin, parce que Machin ne pense pas comme nous.
Ne prenons pas tout au sentiment, soyons pragmatiques, soyons factuels, le sentiment ne doit pas rentrer dans la réflexion ou le débat. Soyons froids et dans le concret pour échanger nos idées.
Réapprenons les bases. Soignons notre verbe, élargissons notre vocabulaire car le plus de vocabulaire nous aurons, le moins de violence il y aura. L’insulte est le dernier recours à celui qui manque de vocabulaire, tout comme le poing est à celui qui manque d’arguments.
Méfions-nous des discours culpabilisants, moralisateurs car c’est le premier pas vers la dictature. Tout argument allant vers le sentiment ou l’empathie est signe de manipulation, c’est de la malhonnêteté intellectuelle, car seul le concret, les faits, peuvent faire pencher objectivement la balance d’un côté ou de l’autre. Ne jamais oublier que montrer une personne du doigt c’est en pointer trois autres sur soi-même. Que celui qui répète un argument pré-construit n’a pas mûri sa réflexion, il n’est pas mature pour le débat. Ne jamais oublier notre histoire, nos basiques, la logique, notre bon sens, attention au jugement. Qui diable sommes-nous pour juger ?
Vive la paix, vive la liberté, laissons les gens penser ce qu’ils veulent, car après tout, cela ne nous regarde pas.
Et oui, comme à chaque fois ici, j’appelle à la responsabilité de chacun, car c’est ce qu’on nous enlève année après année, et c’est ce qui risque de nous faire sombrer. Au plus l’état à de pouvoir, au plus il nous dicte une ligne de conduite collective, au moins nous avons de responsabilité personnelle, au plus nous sommes infantilisés, et c’est la porte ouverte à toutes les fenêtres.
Je te rassure, la semaine prochaine, on va se détendre avec un petit sujet parfait pour être au top, pour bien se remettre sur les rails du métro-boulot-dodo, suspense.
Je laisse le mot de la fin à Lamartine, et te dis à jeudi : « Il n’y a d’homme plus complet que celui qui a beaucoup voyagé, qui a changé vingt fois la forme de sa pensée et de sa vie ».
Bisous Libres 🕊
Si chacun pouvait se rallier à la phrase de ton prologue, la liberté de penser serait enfin respectée! Dès qu’on aborde l’esprit des humains c’est compliqué car chacun agit comme s’il était le seul à avoir raison et que tous les autres ont tort. Cet égocentrisme s’exerce dans les idées exprimées ainsi que dans tous les actes de la vie et c’est dommage de ne pas vouloir s’enrichir des pensées et actes des autres. J’aime la phrase de Lamartine en conclusion. J’espère que ce billet fera réfléchir…
Merci pour ton retour, je l’espère aussi ✌🏻